Juliette LASNON, co-fondatrice de MooM : « Être start-uppeur à 40 ans, c’est possible ! »

01 juin 2022
Juliette Lasnon

EURATECHNOLOGIES. Roubaix, 2022. Quelques jours plus tôt, je tombais un peu par hasard sur une application aux couleurs chatoyantes et me voici maintenant dans les couloirs de Blanchemaille, une antenne roubaisienne de l’incubateur lillois Euratechnologies. A la rencontre de Juliette LASNON, co-fondatrice de l’application éco-responsable « MOOM ». Une application mobile permettant de revendre, donner, échanger, louer, réparer, recycler… de faire vivre les produits de seconde main grâce à un nouveau modèle de marketplace.

Juliette m’accueille avec un grand sourire, qu’elle gardera sur son visage jusqu’à la fin de cette interview, et j’imagine jusqu’à la fin de sa journée. Cette jeune dirigeante se qualifie elle-même d’OVNI dans ces locaux remplis de trentenaires tournés vers l’aventure de l’entreprenariat. Pourtant, on sent chez elle la même détermination que ces nouveaux chefs d’entreprise plein d’ambition. Cette ancienne d’AUCHAN a passé 21 ans dans le groupe de la famille Mulliez, dont 18 dans le secteur textile. Elle a pu donc expérimenter divers métiers du domaine, de l’animation commerciale en passant par le marketing et le management d’équipes. Mais à 40 ans, de nombreuses questions se bousculent dans sa tête et elle fait face au doute.

« A 40 ans, je m’interrogeais sur mon employabilité et sur le sens de mes actions professionnelles. J’ai fait un bilan de compétences et j’ai repris mes études pour acquérir des compétences complémentaires, notamment dans le e-commerce ! »

Un an plus tard, avec un master spécialisé en poche, elle concrétise son diplôme dans le secteur e-commerce d’Auchan mais sa recherche de sens est loin d’être terminée. Elle quitte alors son emploi et fait la rencontre de Jean-Philippe, qui deviendra son associé. Elle m’explique alors leurs rêves, leurs (nombreux) échanges et leurs discussions quasi-philosophiques qui s’enchaînent. Jusqu’à planter les premières graines de MooM. C’était en mars 2020, la genèse de MooM était lancée.

« On est la génération des incubés confinés. J’étais en rendez-vous avec un start-uppeur d’Euratech un matin, et il nous a parlé des jurys qui avaient lieu l’après-midi même pour déterminer quelles entreprises allaient être incubées. On s’est lancés, Jean-Philippe a fait le speech… et nous voilà ! »

La petite entreprise a démarré sur les chapeaux de roue, puisque l’incubation nous lance de gros challenges. « En six mois, il fallait que l’on structure tout ce qu’on avait mis sur papier pendant le confinement. » Leurs rêves devenaient réalité, et c’est à ce moment-là qu’ils devaient absolument définir leur cible, le marché qu’ils allaient prendre, tout en s’entourant des bonnes personnes. Avec 8 salariés en CDI ou en alternance, ils avancent plutôt sereinement pour répondre à leurs ambitions. Il faut savoir que MooM est une société à mission, avec une raison d’être plutôt explicite : « Mettre le produit au cœur de toutes les attentions, pour qu’il dure le plus longtemps, qu’il profite au plus grand nombre et ne devienne jamais un déchet. » En clair ? Ils mettent en application leur manière de penser l’économie circulaire pour qu’elle réponde aux enjeux du retail. Ils offrent donc une solution complète intégrant tous les acteurs du secteur : les marques, les consommateurs et les spécialistes de la collecte, de la réparation et du recyclage. Juliette en profite d’ailleurs pour me détailler les problématiques que les entreprises du textile (principalement) peuvent rencontrer aujourd’hui : les marques sont légalement responsables de leur produit à partir du moment où celui-ci entre sur le marché et jusqu’à sa sortie. C’est la raison pour laquelle elles s’impliquent de plus en plus dans la seconde main et dans la consommation responsable, inscrite dans les enjeux RSE des entreprises.

« MooM leur propose ainsi de reprendre le contrôle de leurs produits et de recapter la valeur de la seconde main. Même si on fait face à un paradoxe entre la démarche éco-responsable existante et les coûts que cela engendre… Forcément, consommer plus intelligemment peut coûter plus cher, donc la fast fashion continue à prendre du terrain… Je reste optimiste quant aux nouveaux modes de consommation et surtout quant à l’implication des consommateurs de demain ! Il faut qu’on arrive à donner du sens et surtout à expliquer pourquoi il faut que cela change. »

MooM aujourd’hui, c’est une application téléchargée 32 000 fois depuis novembre 2021, avec 10 000 comptes actifs dessus, 20 000 biens proposés et 11 000 annonces sur la marketplace. C’est une application avec des projets à foison, de nouvelles pistes de partenariats avec des marques toujours engagées, et des milliers de dressings reconstitués. C’est également une application qui se rêve en plateforme référente de l’économie circulaire d’ici dix ans, avec 60 millions d’utilisateurs français et tout autant en Europe. Et ce seront des « Moomers » extrêmement fiers de se dire qu’ils auront évité à des millions de produits de se retrouver à la poubelle inutilement. Ce seront aussi des Moomers marqués par le management bienveillant prôné par leur Directrice Marketing, animée par la volonté d’apprendre et de transmettre au quotidien à ses équipes.

« Il n’y a pas qu’un seul chemin, j’en suis l’exemple même. On peut aller dans une voie et en prendre une autre. Aujourd’hui, on a la chance de pouvoir se former tout au long de notre vie. Avant, on rentrait dans une entreprise et on y faisait sa carrière. Alors saisissez les opportunités, apprenez, découvrez. On recrute de plus en plus des personnalités, développez vos savoir-être. »